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Travail sur le ciblage
jeudi 29 novembre 2007, par
Le "ciblage" c’est travailler du point de vue de la cible à toucher plus que du point de vue du coup à donner. Au final l’objectif est de sentir quelles cibles sont intéressantes à viser et de s’adapter à cette sensation, plutôt que de sentir quel coup donner en fonction de ce qui semble plus naturel, plus facile ou plus rapide (mais parfois sans prendre en compte la situation réelle et l’adversaire).
Dans cette optique, trois axes me semblent intéressants à travailler en canne de combat :
- la précision de la touche (rien ne sert de viser le mollet si on touche en cuisse)
- détecter les zones potentielles (exploiter une zone "libre")
- la construction autour d’une zone visée ( "libérer" une zone pour finalement la toucher)
Bien sûr, comme tous ceux de cette rubrique, cet article correspond à la réflexion personnelle de l’auteur et n’engage que lui (cet article n’a aucun critère officiel).
Justification : pourquoi travailler le "ciblage"
Lorsqu’on apprend la canne de combat, on commence souvent par apprendre les coups, puis à les enchaîner. Un bel enchaînement de 5-6 coups, permet de travailler la fluidité, la concentration, la souplesse, le positionnement etc... Mais souvent, ce travail est fait indépendamment du partenaire, qui est généralement là pour laisser travailler. Lorsqu’on rentre dans une problématique d’opposition, cette habitude de penser en terme de coups peut poser problème. Le tireur reste parfois "dans son enchaînement" malgré la réalité de la situation, il reste dans son nuage.
Travailler sur le "ciblage" est une manière de focaliser l’attention du pratiquant sur un élément extérieur : "la zone à toucher". Idéalement, l’idée est de passer d’une réflexion basée sur les coups "qui viennent" à une réflexion basée sur les zones "qui touchent".
Prérequis : le minimum est de connaitre les coups de base de la canne de combat et les zones de touche légales .
Objectif
L’objectif est de prendre conscience de la cible. Cette conscience de la cible permet de sortir de son travail sur soi (je fais bien le mouvement académique vers une cible considérée à priori statique) pour aller vers un travail sur l’autre (le mouvement que je fais touche une cible qui est en mouvement, vivante : l’important c’est la touche pas mon coup). Sur cette base on essaie de prendre la main sur l’assaut en provoquant une situation où la cible visée est plus accessible. La cible ne se donne pas d’elle même, il faut aller la prendre.
Axes de travail
On peut distinguer plusieurs axes de travail dans cette thématique :
- précision : En canne de combat, les zones de touche sont restreintes. En situation rapide ou tendue on perd souvent en précision, jusqu’à toucher des zone interdites (la cuisse par exemple). Aussi il est important de ne pas seulement viser ’en gros’ la zone, mais d’être capable de viser un point particulier de la zone. Non seulement, cela permet de continuer de toucher la zone en situation, mais cela peut permettre de viser un point découvert, si la parade adverse est insuffisante.
- viser : Il s’agit d’améliorer sa capacité à s’organiser pour aller chercher une zone donnée. On choisit mentalement une zone et on regarde dans les différentes situation quels sont les problèmes et les solutions pour aller toucher cette zone. Comment aller chercher la jambe avant si l’adversaire avance, recule ? Comment toucher un flanc lors de la volte adverse ? etc...
- construire : Il s’agit de se donner les moyens pour que la zone visée ne soit pas protégée. Un travail sur la "lecture" de l’adversaire pour trouver une zone en difficulté (parade lointaine, appui lourd) permet une première exploitation de ce travail de "ciblage". A ce niveau, c’est ce travail de lecture qui fait le choix de la zone à "cibler". Dans un second temps, une fois la lecture acquise, il s’agira de provoquer chez l’adversaire la mise en difficulté de ces zones (fixage, cadrage, enchaînement etc.).
Une séance possible
Proposition de séance d’entraînement (en 1h30).
Échauffement : Classique, plus un travail sur les fentes pour préparer au "ciblage" bas et plus un travail sur la coordination et la décontraction pour que les coups qui ne seront plus le centre d’attention passent sans heurt (et restent dans la touche et pas la frappe)
Par exemple :
- quelques minutes de course (avec déplacements latéraux, talon-fesse, genoux-poitrine).
- sollicitation (étirement, assouplissement, proprioception) :nuque, épaules, coudes, hanches, genoux, dos, écart, passage d’une jambe à l’autre.
- Shadow à 2 (1 horizontal, 1 vertical avec changement de rôle).
- avec la canne : Manipulation de l’épaule, bras tendu, avec occupation de l’espace et changement de main. L’objectif est de prendre conscience du volume brassé par la canne.
- même exercice les yeux fermés.
- même exercice en intégrant des coups souples et amples.
Travail sur la précision :
- A tient la canne horizontale, B enchaîne latéral extérieur et latéral croisé en visant les extrémités de la canne. 4 fois puis changement de rôle.
- A tient la canne verticale, B enchaîne croisé tête et brisé tête sur le sommet de la canne tendue.
- Les deux exercices mais A change de position
Les zones de frappe :
- En mouvement, A présente une parade (jamais deux fois la même hauteur), B attaque sur en doublant. On arrête le second coup et on vérifie la position.
- Appel par le moniteur d’une hauteur "tête", "flanc" ou "jambe". A attaque, B se défend. En mouvement
Ciblage (avec protections) :
A porte un casque mais pas de canne
- Appel d’une hauteur par le moniteur, mais sans parade, A reste en mouvement.
- Même exercice mais A est de dos et se retourne à l’appel.
- Même exercice mais B enchaîne 2 attaques libre mais pas à la hauteur appelée, puis une attaque à la hauteur appelée. Arrêt de l’attaque finale pour vérifier la précision.
A reprend une canne
- B annonce une hauteur, A présente une parade ailleurs, B enchaîne 2 coups sur cette parade et 1 sur la hauteur annoncée.
Combat souple de mise en pratique. Consigne de mise en pratique : penser la cible avant d’attaquer.
Étirements
Cet article est une introspection basée sur mon expérience personnelle. Pour être réellement aboutit, il faudrait le rapprocher du corpus officiel pour à la fois étayer ses fondements théoriques et enrichir ses développements.
Messages
1. Travail sur le ciblage, 4 décembre 2007, 17:26, par Frédéric Morin
Trés intéressante approche Julien. Tu appuies sur un point important quand tu parles de "Cette conscience de la cible " car souvent, en assaut, on ne voit pas forcément correctement les zones libres (non protégées par une parade)...surtout si ça va vite. Le fait d’ajouter des déplacements aux exercices est également un point que j’aime beaucoup dans ton approche. Il est clair que la codification assez stricte (armés, coups précis...) entraîne parfois des freins au niveau du corps et la recherche d’un travail en relative décontraction reste également une piste à explorer. Merci pour cet exemple de séance !
1. Travail sur le ciblage, 4 décembre 2007, 19:36, par Julien Falconnet
Merci pour le retour et les compliments.
Écrire sur la canne est un exercice difficile, ça demande de mettre des mots sur des choses ressenties. C’est très récent que je puisse le faire, mais c’est pour moi un passage nécessaire pour la préparation d’un cours. Écrire ce que je ressens, en sortir les idées forte, et essayer de trouver les exercices pour faire découvrir ou transmettre ce ressenti. La contrainte de temps et de public renforce encore cette difficulté. Aussi je suis preneur de tous les encouragements et conseils... merci à toi.
Concernant d’autres pistes, effectivement au delà du ciblage tel que je le définis là (travailler en fonction de la cible), il y a sans doute un travail plus avancé sur la décontraction et la "conscience" de l’assaut et des zones libres. Il serait en effet naturel une fois qu’on sait construire son assaut en fonction des cibles, d’aller un cran plus haut pour perfectionner cette lecture et son adaptation (nécessaire décontraction). Mais ce sont des expériences que je ne fais que pressentir pour le moment. Il faudra sans doute pas mal de pratique et de progression avant que je puisse écrire quelque chose de conséquent sur le sujet et encore plus pour que je trouve des exercices à même le faire sentir.